Le Top 10 des scandales d’arbitrage en NBA

Regrets

Attention : ce top 10 ne prend pas en compte les actions contestables qui auraient pu à elles seules changer le cours d’un match. Ce top 10 se concentre les séries de matchs mal arbitrées dans leur ensemble, et qui ont clairement favorisé une équipe. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, celles-ci ne sont pas si nombreuses (si on sait faire preuve d’objectivité). Pour réfuter toute théorie du complot, on s’appuiera sur des faits clairs, qui amènent à penser que les matchs de la série ont été au mieux suspicieux, au pire arrangés. Et comme toute accusation mérite d’être défendue, on s’efforcera de trouver des arguments pour infirmer ce qui est soulevé.

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Hors-série :

Curieusement, il y avait très peu de litiges concernant l’arbitrage avant l’arrivée de David Stern au poste de commissionnaire. En 1978, la ligue avait l’occasion d’assister à une spectaculaire finale entre les Sixers et les Nuggets (David Thompson contre Erving), et en 1979, à une finale plus qu’intéressante entre les Spurs et les Suns (Davis et Westphal contre Gervin). Les quatre matchs de play-offs les plus importants étaient les suivants : Denver-Seattle, 1978 (à 2 victoires partout), Washington-Philadelphie, 1978 (à 3-2 pour les Bullets), Phoenix-Seattle, 1979 (à 3-2 pour Phoenix) et San Antonio-Washington, 1979 (à 3-2 pour les Spurs). Devinez quoi ? Les équipes les moins intéressantes ont gagné ces quatre matchs. Je ne sais pas si vous avez remarqué, mais ça n’arrive plus du tout maintenant.


Bryant_Game7_2010

10. Los Angeles Lakers – Boston Celtics (Finales NBA 2008) / Boston Celtics – Los Angeles Lakers (Finales NBA 2010)

La partie civile : Dans ces deux finales opposant les mêmes équipes, on peut déceler des choses très curieuses. En 2008, lors du Match 2, les Lakers ont tiré dix lancers francs ; les Celtics en ont tiré trente-huit. Si on peut pardonner les arbitres sur certaines fautes, lorsqu’une équipe tire vingt-huit lancers francs de plus qu’une autre, c’est qu’il y a un problème quelque part. Et en 2010, lors du Match 7 décisif, Kobe Bryant, en grosse difficulté au tir, s’est rué vers le panier pour obtenir des fautes. Il les a toutes obtenues et a tiré quinze lancers francs ; l’ensemble des joueurs des Celtics en ont tiré dix-sept. Comme Bryant avait plus d’aura que toute l’équipe adverse, on peut croire que la ligue avait tout intérêt de la ligue à ce que les Lakers gagnent (surtout que Bryant n’avait encore jamais battu les Celtics en play-offs).

La défense : Tout cela reste quand même pure spéculation. En 2008, la ligue avait plutôt intérêt à ce que les Lakers gagnent le Match 2 (ils étaient menés 1-0) ; et en 2010, la blessure de Kendrick Perkins a permis à Bryant de pénétrer dans la raquette plus facilement, ce qui explique le nombre élevé de lancers francs qu’il a obtenus. En fin de compte, on ne peut pas vraiment dire que l’une des deux équipes a été favorisée : les arbitres ont simplement été mauvais. Ce sont des choses qui arrivent.


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9. Miami Heat – Indiana Pacers (Finales de Conférence Est 2014)

La partie civile : Rien de scandaleux dans cette série… du moins jusqu’au Match 5. Le Heat menait 3 victoires à 1 et tout laissait penser qu’ils allaient se qualifier sans trop de problèmes. Mais Paul George a alors râlé en reprochant aux arbitres de siffler trop de fautes en faveur du Heat. Du coup, lors du Match 5, le meilleur joueur de Miami (LeBron James) s’est fait surveiller étroitement et n’a pas arrêté d’être sanctionné pour des fautes mineures, voire inexistantes. Il s’est fait siffler sa cinquième faute à vingt minutes de la fin, a dû limiter le reste de son temps de jeu et les Pacers ont gagné 93-90. Il faut croire que la ligue voulait un Match 7, ou au moins un Match 6. Et ce n’était pas le seul problème cette année-là : DeAndre Jordan et Chris Paul se sont eux aussi fait siffler des fautes complètement ridicules lors de la série contre le Thunder.

La défense : Bien que l’attitude de James en match à cette période était contestable (comme on le verra plus tard), il est clair que les arbitres se sont laissés influencer par les propos de George. Mais il avait parlé sous le coup de la frustration. Si Miami obtenait plus de fautes que les Pacers, c’était parce que leurs joueurs attaquaient le panier deux ou trois fois plus, ce qui expliquait la différence à ce niveau. Ceci dit, tout cela n’a pas porté tant que ça préjudice à Miami, qui a fini le boulot au Match 6. Disons qu’il s’agissait simplement d’un match mal arbitré.


O'NealVSBlazers

8. Portland Trail Blazers – Los Angeles Lakers (2000)

La partie civile : Cette série a été incroyable de bout en bout. Personne n’aurait misé un centime sur les Blazers contre des Lakers au sommet de leur art, qui comptaient dans leurs rangs les deux plus grandes stars de la NBA (O’Neal et Bryant). Après le quatrième match, les Lakers menaient 3-1 ; mais ils ont perdu les deux matchs suivants, et la victoire de Portland est devenue crédible. C’est là que l’arbitrage s’en est mêlé. Au Match 7, les Lakers ont tiré trente-sept lancers francs contre seulement seize pour les Lakers. Deux des trois meilleurs joueurs de Portland (Scottie Pippen et Arvydas Sabonis) ont été exclus pour six fautes, alors que leur rôle était primordial car ils avaient pour mission de couvrir Kobe et Shaq. Il est déjà assez suspect de voir une équipe tirer vingt-et-un lancers francs de plus que l’autre, mais quand douze de ces fautes se font au détriment des joueurs chargés de défendre sur les deux meilleurs adversaires, c’est vraiment plus que douteux (d’autant plus que Pippen a une moyenne en carrière inférieure à trois fautes par match). Avec Sabonis hors-jeu, les Blazers ont collé sur un O’Neal à son apogée le pauvre Brian Grant, un ailier fort de 2,06 m. Et ils ont perdu le match.

La défense : Même si les Blazers étaient défavorablement jugés par les arbitres, on ne va quand même pas pleurer sur leur sort. Ils avaient réussi à avoir quinze points d’avance au quatrième quart-temps et ils ont tout gâché. Ils ont raté quelques tirs, se sont crispés et l’entraîneur Mike Dunleavy a fait n’importe quoi avec un coaching totalement illogique. Aussi mauvais qu’aient été soient les arbitres, les Blazers se sont plantés. Ils ne méritaient ni de se qualifier, ni de remporter le titre. Point.


Yao

7. Houston Rockets – Dallas Mavericks (Finales de Conférence Ouest 2005)

La partie civile : Déjà suspicieux, ce match l’a été encore plus après les allégations de l’arbitre véreux Tim Donaghy, reconnu coupable d’avoir arrangé des matchs. Dallas a perdu les deux premiers matchs en accusant Yao Ming, le pivot vedette de Houston, de faire des écrans illégaux. Au troisième match, les arbitres ont commencé à siffler davantage de fautes contre Yao, limitant son temps de jeu. Et Dallas a remporté la série 4-3. D’après Donaghy, un arbitre aurait confié à l’entraîneur des Rockets, Jeff Van Gundy, qu’ils avaient reçu l’instruction d’être plus sévères contre Yao. Van Gundy a été condamné à une amende de 100 000 $ pour avoir évoqué publiquement la conversation présumée.

La défense : Le problème dans le cas présent, c’est que tout repose sur des « on-dit ». Et on peut se demander quel crédit apporter à un homme comme Tim Donaghy. Même si certaines des fautes commises par Yao n’auraient sans doute pas dû être sifflées, mettons un point d’interrogation là-dessus.


Suns_Sonics

6. Phoenix Suns – Seattle Supersonics (Finales de Conférence Ouest 1993)

La partie civile : Il n’y a pas grand-chose à dire sur la série en elle-même. Pour le septième match, en revanche, c’est une autre histoire. Les Suns l’ont emporté 123 à 110, ce qui laisse penser que leur victoire ne souffre d’aucune contestation. Sauf que les Suns ont tiré un total de… soixante-quatre lancers-francs, contre trente-six à peine pour les Sonics. Certaines équipes n’arrivaient même pas à marquer soixante-quatre points en un seul match à l’époque. Les joueurs de Seattle ont commis trente-huit fautes personnelles et trois joueurs ont été expulsés ; Phoenix a commis vingt-sept fautes et n’a eu aucun expulsé. Comme Barkley et Jordan étaient les deux stars incontestées de la NBA, on peut penser que la ligue a donné un coup de pouce à son équipe parce qu’elle voulait voir une finale entre les Suns et les Bulls.

La défense : D’accord, les Suns ont tenté vingt-huit lancers de plus que les Sonics, mais le match était très fermé et on ne peut pas vraiment dire que toutes les fautes étaient contestables. Bien sûr, les soupçons concernant Barkley et Jordan sont légitimes. Mais ça ne constitue pas une preuve. Encore une fois, on peut accorder à la ligue le bénéfice du doute.


BucksSixers2001

5. Milwaukee Bucks – Philadelphia 76ers (Finale de Conférence Est 2001)

La partie civile : La controverse a été lancée par Ray Allen avant le Match 6 de cette série. Il a déclaré que la NBA préférerait voir les 76ers affronter les Lakers en finale plutôt que les Bucks. Les Bucks se sont plaints de l’arbitrage après le Match 4, lorsqu’ils ont estimé que Glenn Robinson avait été victime d’une faute non sifflée à un instant décisif du quatrième quart-temps, permettant aux 76ers de sceller la partie. Dans le cinquième match, une faute technique de Sam Cassell et des fautes flagrantes de Robinson et Tim Thomas se sont soldées par une possession de cinq points et deux possessions de quatre points pour Philadelphie. Les Bucks ont perdu sur le fil, 89-88. Mais en dehors de la nature discutable de ces appels, les Bucks se sont également plaints de plusieurs autres coups de sifflets (des fautes sur Cassell et Ervin Johnson en début de match et un écran mobile sur Jason Caffey à la fin du quatrième quart-temps). Cassell avait commencé à protester dès le premier quart-temps, quand Allen Iverson l’avait frappé violemment au bras sur une feinte. Aucune faute n’a été sifflée, même si l’action avait eu lieu juste devant l’arbitre Ronnie Nunn. Les 76ers se sont qualifiés pour la finale et les Bucks sont restés sur le carreau.

La défense : Voilà la première série de matchs de ce top 10 difficilement défendable. Les Bucks font sans doute preuve d’un peu de mauvaise foi, même s’ils ont admis avec lucidité après le Match 5 que leurs trois erreurs leur avaient coûté le match. Mais en revoyant la série, on se rend quand même bien compte que toutes les décisions semblent en leur défaveur. Comme l’a dit Ray Allen : « Neuf fois sur dix, les arbitres n’ont aucun parti pris. Mais pour tout le monde, Philadelphie et le MVP doivent aller en finale. »


KnicksHeat2012

4. New York Knicks – Miami Heat (premier tour des play-offs 2012)

La partie civile : Le premier match de cette série est le pire match arbitré de l’histoire récente de la NBA. En première mi-temps, les Knicks ont tiré huit lancers francs, et le Heat… vingt-cinq ! Pire encore, les Knicks se sont fait siffler huit passages en force. En d’autres termes, ils sont allés sur la ligne à peu près aussi souvent que LeBron James a floppé. Ses simulations étaient si flagrantes que plusieurs joueurs de la NBA ont fait part de leur colère sur Twitter. Klay Thompson a déclaré qu’il « ne respecterait jamais les floppeurs ». Patrick Patterson s’est demandé : « Quel genre de ligue sportive sommes-nous en train de devenir ? » Des journalistes de premier plan ont dit qu’ils « ne regardent pas les matchs truqués ». Même Jeff Van Gundy était stupéfait. Il est rare qu’un commentateur critique l’arbitrage en plein match, mais il n’a pas pu se contenir : « Je vais laisser les images parler. Personne ne peut tomber de cette manière-là. »

La défense : La seule chose qui atténue le scandale, c’est que les Knicks n’avaient aucune réelle chance de se qualifier, même dans des circonstances équitables. Mais quand même ! Ils avaient tellement peur de jouer physique au milieu du deuxième quart-temps du Match 1 que les membres du Heat ont obtenu tous les coups de sifflet qu’ils voulaient. Les arbitres ont été horribles, mais LeBron James est au moins aussi responsable qu’eux, car tout est arrivé par la faute de ses flops ridicules. La ligue a d’ailleurs dû réagir par la suite et ils l’ont plutôt bien fait. Aujourd’hui, les flops sont jugés plus sévèrement (et ce n’est que justice).


Spurs-Suns-2007

3. San Antonio Spurs – Phoenix Suns (Demi-finales de Conférence Ouest 2007)

La partie civile : Cette série a été gâchée par un ensemble de mauvaises décisions. Encore une fois, à la baguette, on retrouve l’inénarrable Tim Donaghy. Dans le Match 3, Donaghy, qui était au milieu du terrain, a sifflé une faute contre les Suns deux secondes après la fin d’une action sous le panier, alors que l’arbitre situé à quelques centimètres des joueurs n’avait rien dit. Amar’e Stoudemire a également passé toute la deuxième mi-temps avec un problème de fautes, après un flop qui a abouti à sa quatrième faute une minute seulement après le début du troisième quart-temps. Au quatrième match, Robert Horry a balancé Steve Nash sur la table de marque alors que la victoire des Suns était acquise, et Stoudemire et Diaw ont été suspendus. Pourquoi ? Parce qu’ils s’étaient levés du banc. Ils ne se sont pas allés se battre avec Horry : ils se sont juste levés du banc. Techniquement, la suspension était conforme aux règles. Mais c’est complètement stupide : si l’un de vos amis se fait frapper dans un bar, croyez-vous que la police vous arrêterait simplement pour avoir marché vers l’agresseur ? Bien sûr que non. Parce qu’il n’y a rien de mal à être en colère quand quelqu’un s’en prend à votre ami ou votre coéquipier. Ce qu’a fait Horry n’avait aucune classe. Il a directement provoqué la suspension de deux des meilleurs joueurs des Suns, et a permis aux Spurs de remporter la série.

La défense : Cette fois, on entre dans du lourd. Le fait que la NBA laisse une faute technique changer le sort d’un championnat est tout simplement indéfendable. Dans le cinquième match des demi-finales de la Conférence Est 1997, opposant Miami et les New York Knicks, Charlie Ward et P.J. Brown se sont battus et Patrick Ewing, Allan Houston et Larry Johnson ont été suspendus alors qu’ils étaient totalement étrangers à leur altercation. Mais la NBA n’avait jamais fait face à une telle situation auparavant, et l’incident n’a guère changé le cours de l’histoire car les Bulls étaient imbattables en 1997. Toutefois, ce qui s’est passé dix ans plus tard est totalement inexcusable. Les Suns avaient toutes les chances de remporter le titre. Ils avaient l’avantage du terrain. Ils venaient d’égaliser. Kurt Thomas avait réussi à contenir (à peu près) Tim Duncan. Et sans Stoudemire et Diaw, Phoenix a presque battu les Spurs dans le cinquième match. Avec ces deux joueurs, les Suns auraient certainement gagné la série. En Finale de Conférence, ils auraient affronté une médiocre équipe du Jazz, et une équipe des Cavs limitée en finale. On se souviendra différemment des carrières de Steve Nash et de Stoudemire à cause de ce match.


MIADAL2006

2. Miami Heat – Dallas Mavericks (Finales NBA 2006)

La partie civile : Cette série est l’une des plus grosses farces de l’histoire de la NBA. Dallas a remporté les deux premiers matchs de la finale, avait une avance de treize points dans les six dernières minutes du Match 3 à Miami… et là, tout s’est effondré. Wade a obtenu tous les coups de sifflet qu’il recherchait et a fait remonter Miami pour emporter la victoire. Les Mavericks ont été horribles dans le Match 4, puis se sont repris dans le Match 5 avant de se faire entuber par un arbitrage encore plus douteux, avec des décisions incompréhensibles. Wade a tenté autant de lancers francs (vingt-cinq) que l’ensemble de l’équipe de Dallas et a marqué les points gagnants sur la ligne des lancers-francs, après une course vers le panier à l’aveuglette et un coup de coude à peine perceptible de Nowitzki à douze mètres du panier, qui a été sifflé par Bennett Salvatore. Miami l’a emporté en six matchs ; en tout, Wade a tenté le nombre incroyable de quatre-vingt-dix-sept lancers francs. L’effet combiné de cette finale désastreuse et le scandale Tim Donaghy a poussé les pouvoirs en place à se rendre enfin compte que les arbitres avaient un peu trop de pouvoir. Aucune équipe dépendait des arbitres autant que le Heat. Les arbitres sifflaient tous les contacts sur Shaquille O’Neal et protégeaient Wade chaque fois qu’il allait vers le panier. Quand ils sifflaient correctement, Miami était plus que battable ; si les arbitres oubliaient des fautes, ils ne valaient plus rien.

La défense : Ce qui s’est passé ici est une histoire de circonstances. La NBA était aux prises avec une grosse crise d’identité en matière de style de jeu. Les règles avaient été changées pour limiter l’usage des mains en défense, et accélérer le jeu afin que plus de points soient marqués. Certaines équipes avaient assimilé tout cela : elles attaquaient le panier, remontaient rapidement la balle et pensaient à la ressortir ; d’autres continuaient ce qui avait marché entre 1994 et 2005 : un rythme ralenti, une défense de fer et une attaque qui tournait autour d’un seul homme. Miami et Dallas représentaient les façons de penser de la vieille école et la nouvelle école. Personne ne voulait regarder une équipe aussi prévisible offensivement que Miami. Personne ne voulait voir un joueur prendre tous les tirs dans les moments importants pendant que tout le monde le regardait faire. Personne ne voulait voir une équipe jouer entièrement la possession et marcher sur le terrain. Personne ne voulait que les arbitres décident le sort des matchs d’après leurs interprétations de « la superstar qui fonçait vers le panier et essayait d’obtenir une faute ». Mais c’est ce qu’ils ont fait et le résultat a été catastrophique. Cela dit, en fin de compte, Miami méritait quand même de gagner pour avoir été une équipe plus solide et plus expérimentée. Dallas a baissé le pied dans la dernière ligne droite ; Miami est resté calme. Dallas n’a pas arrêté de gémir pendant deux semaines d’affilée ; Miami ne s’est jamais plaint. Avery Johnson angoissait sur son banc ; Pat Riley avait toujours l’air de se préparer à déboucher une bouteille de champagne. Même le langage corporel des deux superstars était différent : Wade était frais et lucide, mais Nowitzki fronçait constamment les sourcils, arrachait son protège-dents et n’arrêtait pas de se plaindre. Il a été mauvais dans toute la série. Et ses coéquipiers ont implosé avec lui. Il s’est quand même vengé cinq ans plus tard, et on en est très heureux pour lui.


KingsLakers2002

1. Los Angeles Lakers – Sacramento Kings (Finales de Conférence Ouest 2002)

La partie civile : On ne va pas s’étendre là-dessus : tout a déjà été dit dans la série d’articles consacrée au sujet. Les Kings étaient les meilleurs. Ils étaient plus motivés. Ils avaient plus de profondeur. Chris Webber jouait aussi bien que Shaq. La dynastie des Lakers aurait dû s’arrêter là. Sans la parodie connue sous le nom de Match 6, les Kings auraient remporté cette série. Et par la suite, l’arbitre Tim Donaghy a affirmé plusieurs fois que ce match avait été truqué.

La défense : Contrairement à ce que prétend Phil Jackson, ce qui s’est passé dans cette série est bien plus scandaleux que les événements de 2006 entre Dallas et Miami. Il n’y a aucune circonstance atténuante. Aucune. Les Lakers étaient une équipe de superstars avec un gros marché qui comptait dans ses rangs Kobe et Shaq ; une finale entre deux les Kings et les Nets aurait été un désastre financier. L’infamie du Match 6 est tout simplement trop grave pour être ignorée. Les Sacramento Kings auraient dû remporter le titre en 2002. Il n’y a rien d’autre à dire.

Le voyageur

« Grantland.com » était un site internet journalistique sur lequel étaient publiés des articles consacrés essentiellement au sport. Il a fermé définitivement ses portes le 30 octobre 2015. Quelques-uns de ses articles et portraits consacrés à la NBA (traduits en français) sont repris sur ce site. Les droits sur les textes, bien entendu, appartiennent à leurs auteurs.

Devenu agent libre, Thomas Robinson parviendra-t-il à s’installer à long terme dans une équipe NBA ?

par JONATHAN ABRAMS, le 1er juillet 2015

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Lorsque David Stern annonça sa sélection en cinquième position à la draft de 2012, Thomas Robinson fondit en larmes et embrassa sa sœur cadette. C’était une formidable récompense, après la tragédie et le chagrin qu’il avait endurés. « Il a dû passer d’un seul coup du statut d’enfant à celui d’adulte », témoigne Barry Hinson, ancien directeur des opérations basketball de l’Université du Kansas. La NBA représentait une chance de mener une vie confortable, et cette nuit-là, ce qui n’était un rêve d’enfant est devenu réalité. Huit mois plus tôt, un entraîneur adjoint avait dit à Robinson que s’il faisait une bonne troisième année, il pouvait s’attendre à être sélectionné en fin de premier tour. Robinson s’était fâché. Il ne pensait pas que vingt-sept joueurs étaient meilleurs que lui. Ses performances lui donnèrent raison et Robinson mena l’université du Kansas en finale du championnat national.

Les Sacramento Kings avaient recruté Robinson dans le but de l’associer avec le jeune joueur vedette de l’équipe, DeMarcus Cousins. Comme Cousins, Robinson avait été un intérieur dominant à l’université, et les Kings semblaient pouvoir construire autour de ce secteur. « Je pense que c’est arrivé parce que c’est là que ce joueur était supposé être, déclara à la presse Keith Smart, alors entraîneur de Sacramento, après la sélection de Robinson. Parfois, ça se passe comme ça. On atteint un certain niveau, puis, le moment venu, on finit par arriver là où l’on est supposé être. »

Si la sélection de Robinson était prédestinée, comme le prétendait Smart, son séjour à Sacramento ne dura pas longtemps. L’année suivante, lorsque la date de fin des transferts approcha, Sacramento – une franchise connue pour ses décisions énigmatiques en matière de gestion – fut la seule à échanger l’un des cinq premiers choix de la précédente draft. Robinson attaque aujourd’hui sa quatrième saison en NBA et cherche toujours sa place. Il a été échangé à plusieurs reprises, a été remercié, et a terminé la dernière saison à Philadelphie, une franchise qui paraît se reconstruire sans cesse. Il est peu probable que Robinson signe de nouveau avec les Sixers en tant qu’agent libre (il l’est depuis minuit), mais quel que soit l’endroit où il atterrira la saison prochaine (les Nets se disent intéressés), Robinson est déterminé à trouver une place à long terme en NBA.

Autrefois, Robinson jouait au basket-ball pour l’amour du jeu. C’est toujours le cas, mais les choses ne sont plus les mêmes. En attendant de signer avec sa cinquième équipe en quatre saisons, il joue pour prouver que ceux qui doutent de lui ont tort. « Je ne me suis jamais senti aussi méprisé, a-t-il déclaré à la fin de la saison dernière. Le système me dégoûte. Toutes les raisons pour lesquelles j’avais envie d’intégrer la NBA n’ont plus raison d’être. Je ne suis plus ici pour ce qui me motivait quand j’ai été drafté ou quand j’étais enfant. Mon état d’esprit a complètement changé. En dehors de quelques joueurs, on vous traite comme une marchandise. Aujourd’hui, je ne joue plus pour l’argent, ni par amour du jeu. Je joue parce que je veux qu’on me respecte. Et je garderai cet état d’esprit jusqu’à ce que les choses changent. »

On avait déjà douté de Thomas Robinson. « Honnêtement, il n’était pas si bon. Pas autant que ça, se souvient Dwight Redd, l’un de ses premiers entraîneurs dans sa ville natale de Washington. Sur le terrain, Robinson dépassait souvent ses équipiers en taille, mais en général, il se dirigeait vers la ligne des trois points et tirait de loin. Redd demanda à Robinson d’être plus présent au rebond, le laissant parfois sur le banc pour faire passer le message. S’il avait tendance à rester loin de la raquette, Robinson avait une excellente éthique de travail. Il faisait souvent des heures supplémentaires et travaillait sans relâche. Un acharnement qui porta ses fruits lorsqu’en 2008, Robinson partit jouer dans un camp d’été sponsorisé par Reebok à Philadelphie. « Lorsqu’il est revenu à Washington à la fin de la semaine, le téléphone n’a pas arrêté de sonner, confie Redd. Après l’été, Thomas avait au moins quatre-vingts offres. » En plus de vanter l’attractivité des programmes universitaires, les entraîneurs rivaux essayèrent de débaucher Robinson, en lui glissant que Redd ne pourrait pas le faire passer au niveau supérieur. Redd avait alors pris son joueur à part. « Je vais te dire une chose. C’est toi qui décides. Mais tu iras loin dans la vie en étant loyal. Quand personne ne te connaissait, quand personne ne voulait [t’entraîner], je t’ai hébergé pendant des semaines, alors qu’aucun de ces gens-là ne se souciaient de toi. Tu es le seul à pouvoir décider. »

Robinson est resté avec Redd. Sa mère, Lisa, lui avait appris à être loyal, et Robinson lui montra, ainsi qu’aux personnes qui avaient gagné son estime, qu’il avait retenu la leçon. « Pendant la semaine, Thomas restait chez [Redd] pour qu’il ne soit pas en retard à l’école, explique Lou Wilson, l’entraîneur de Robinson au lycée baptiste Riverdale du Maryland. Si l’on remettait en question son autorité, sa mère faisait preuve d’une grande fermeté. Si Thomas voulait rester le week-end, elle disait : Non. Je veux que tu sois à la maison vendredi soir. Tu as des corvées à faire. »

Voilà pourquoi Robinson cessa de chercher davantage lorsqu’il visita l’Université du Kansas, dans la ville de Lawrence. L’entraîneur, Bill Self, lui avait plu, mais il se sentait surtout attiré par l’atmosphère familiale de l’équipe des Jayhawks. Robinson se lia très vite d’amitié avec les jumeaux Morris, Marcus et Markieff ; leur mère, Angel, s’était installée au Kansas avec ses fils et aimait tous les joueurs de l’équipe. Les jumeaux téléphonaient souvent à la maison pour dire à Angel qu’ils venaient dîner, et elle demandait combien de leurs coéquipiers ils comptaient amener avec eux. « Nous l’appelions Maman. Elle s’occupait de tout le monde, raconte Hinson, le directeur des opérations basketball. Pour moi, pour le personnel, pour les joueurs, elle était comme une mère. Tout le monde l’adorait. »

Robinson se joignit à la troupe, et les jumeaux devinrent triplés. « Il étaient plus que proches, déclare Hinson à propos de la relation de Robinson avec les Morris. C’était comme s’ils étaient collés à la colle forte ou à la Super Glue. » Angel Morris fut surprise lorsqu’elle rencontra Robinson pour la première fois. Il la prit dans ses bras en lui disant : « Ma mère m’a dit de te dire de l’appeler. » Elle trouva cela étrange, car elle ne connaissait pas sa mère. Mais Lisa Robinson s’était renseignée et elle avait appris qu’Angel veillait sur tous les joueurs. Elle s’adressa à elle avec politesse et respect. « Puis-je vous demander une faveur ? Pouvez-vous vous occuper de mon bébé pendant qu’il est là ? » Angel accepta, et elle l’aurait fait quoi qu’il arrive. « Sa mère et moi sommes devenues de très bonnes amies, témoigne Angel. Elle n’aimait pas prendre l’avion. J’ai donc veillé sur son fils. Elle appelait parfois pour me dire que Thomas ne l’avait pas appelée. Je lui disais de ne pas s’inquiéter, que j’allais découvrir pourquoi il ne l’avait pas fait. »

Robinson travaillait souvent avec les jumeaux pour améliorer son jeu. En un-contre-un, ils faisaient partie des meilleurs joueurs qu’il ait jamais affrontés. Mais leur lien était plus profond que le basket-ball. « Quand je les ai rencontrés, je les ai un peu idolâtrés, déclare Robinson. Parce que j’ai rencontré des gens comme moi, avec des antécédents similaires et leur même façon de travailler. » Lorsque Robinson attaqua sa deuxième saison, sa deuxième famille du Kansas joua un rôle vital lorsque ses grands-mères, son grand-père et sa mère décédèrent subitement. Les tragédies se succédaient, avec comme point culminant la mort inattendue de la mère de Robinson, décédée à 37 ans, apparemment d’une crise cardiaque. La perte subie par Robinson fut incommensurable, comme s’en souvient Self : « Je lui ai demandé si je devais informer quelqu’un du décès de sa mère. Thomas a simplement répondu : Coach, je n’ai plus personne.« 

Ces décès affectèrent tous ceux qui étaient en relation avec Robinson. Le père de Hinson était prêtre baptiste et il avait souvent vu des gens faire face à la perte d’un être cher, mais jamais à une telle échelle. « J’ai vu sous mes yeux un gamin se transformer un homme, confie Hinson. Il a dû prendre des décisions entièrement seul. Il n’y avait personne pour l’aider. Pouvez-vous imaginer, à dix-neuf ans, quoi répondre à quelqu’un qui vous demande de choisir la tenue que votre mère va porter dans son cercueil ? » Hinson prétend avoir eu du mal à soutenir Robinson pendant cette période. « Je jouais la comédie à fond, a déclaré Hinson. Je ramais comme un fou. Puis je rentrais dans ma chambre d’hôtel [et] je me mettais à pleurer, parce qu’il était difficile de voir ce que vivait ce gamin. Je me sentais impuissant. Notre travail d’entraîneur, c’est d’ajuster les choses. Une tactique ne fonctionne pas ? On la travaille. Un joueur ne sait pas défendre ? On lui apprend. Un gosse a besoin de soutien scolaire ? On s’en occupe. Quand nos étudiants ont ces problèmes, nous les réglons. On ne pouvait pas résoudre ce problème-là. »

Robinson a tenté de rester fort pour sa sœur Jayla, âgée de neuf ans, qu’il avait toujours protégée. Son père à lui l’avait abandonné très tôt ; le père de Jayla avait déjà purgé une peine de prison avec sursis pour une affaire de drogue. Robinson a accéléré les choses. Il a disputé un match contre l’Université du Texas le lendemain du décès de sa mère, tout en organisant ses funérailles et en faisant ce qu’il fallait pour prendre soin de sa sœur. Il a joué huit minutes, a marqué deux points et pris cinq rebonds. La série de victoires à domicile de 69 matchs des Jayhawks s’est arrêtée avec une défaite de 74-63 contre les Longhorns. « À l’université, vous établissez de véritables liens de fraternité avec les autres. Nous avons donc un peu ressenti sa douleur, déclare Marcus Morris. Quand [on] perd sa famille en si peu de temps, c’est difficile à surmonter. »

À cause de cette proximité, lorsque Marcus et Markieff Morris se sont déclarés candidats à la draft NBA après le tournoi de la NCAA en 2011, Robinson a voulu quitter l’école avec eux. « C’est moi qui ai décidé, révèle Angel. Pas lui. J’ai décidé qu’il n’était pas prêt. » Robinson n’avait pas encore eu l’occasion de s’établir comme un candidat solide au premier tour de draft. Partir après sa deuxième saison universitaire aurait été une erreur à coup sûr ou presque, et la décision d’Angel a sauvé Robinson. « Je ne sais pas comment pas expliquer notre relation, dit Robinson. C’est un peu ma deuxième mère. Elle a repris ce rôle et ne l’a jamais fait d’une manière qui me mettait mal à l’aise. Elle m’a laissé m’y habituer. Elle m’a laissé arriver au point où je suis heureux de la traiter comme telle. »

Angel avait bien fait : Robinson a finalement réussi à briller lors de sa saison junior. L’équipe du Kansas avait toujours pensé que Robinson avait un avenir en NBA, mais en première année – comme tous les rookies – il avait peu joué (près de sept minutes par match derrière les jumeaux Morris et Cole Aldrich). En deuxième année, les statistiques de Robinson ont grimpé à 7,6 points et 6,4 rebonds en 14,6 minutes, mais le grand saut a eu lieu après que ses coéquipiers les plus proches, les jumeaux Morris, sont partis en NBA et ont ouvert la porte à Robinson.

« Nous avons traversé toutes les épreuves avec Thomas, déclare Self en parlant de la saison 2011-12. Je ne sais pas si j’ai déjà géré une équipe où un joueur recevait autant de passes. C’était notre shooteur attitré. » Robinson a atteint une moyenne de 17,7 points et 11,9 rebonds et a emmené les Jayhawks en finale du championnat national, où Anthony Davis et l’Université de Kentucky ont dominé celle du Kansas 67 à 59. Peu de temps après, Robinson se déclara éligible à la draft. « Au fond de moi, je regrette de ne pas l’avoir convaincu de rester une année de plus à l’université, dit Angel. J’aurais aimé qu’il en soit ainsi, mais quand j’ai vu à quel point il était bon en NCAA, j’ai su [qu’il partirait]. »

Le jour de la draft, les Kings, qui choisissaient en cinquième position, n’étaient pas sûr de leur choix. Cela dépendait en grande partie des autres équipes. Robinson avait martyrisé ses adversaires au collège, et certains experts pensaient que Charlotte pourrait le sélectionner en deuxième position. Mais les Bobcats ont finalement choisi Michael Kidd-Gilchrist, de Kentucky, et les Wizards de la ville natale de Robinson l’ont écarté pour Bradley Beal. Cleveland, qui avait recruté Tristan Thompson l’année précédente, avait peu de chances de choisir un autre ailier fort, laissant ainsi la possibilité à Sacramento d’utiliser leur cinquième choix pour prendre Robinson. « La plupart des gens pensaient qu’il serait déjà pris au moment où les Kings devraient choisir, et je sais que Thomas n’est pas venu se présenter chez nous, se souvient Grant Napear, commentateur de longue date de Sacramento. Je crois que nous avons tous pensé que c’était inespéré : il fallait qu’on le prenne. »

Les joueurs qui débutent en NBA, particulièrement les « All-American » universitaires et les cinq premiers choix de draft, peuvent avoir du mal à accepter des rôles plus limités dans la ligue. Bobby Jackson, qui a entraîné Robinson durant sa première ligue d’été en NBA, avait lui-même eu des difficultés en tant que jeune joueur. Ce n’était que lors de sa quatrième saison, à son arrivée à Sacramento, qu’il avait trouvé sa place : celle d’un arrière efficace en sortie du banc. Durant la ligue d’été, Jackson a conseillé à Robinson de ne pas forcer et de rester lui-même. « Beaucoup de jeunes joueurs ne comprennent pas [cela], confie-t-il. Certains d’entre eux viennent avec des attentes élevées. Ils essaient d’impressionner et d’en faire un peu plus, ce qui leur fait commettre bien plus d’erreurs. »

Napear se rappelle que la relation entre les Kings et Robinson avait mal commencé. « Je crois qu’il est entré dans la ligue d’été auréolé de sa gloire universitaire, presque comme s’il était destiné à être la star de l’équipe. Il a essayer de jouer meneur, il a essayé de jouer arrière, et en fin de compte, il a vraiment été très mauvais pendant la ligue d’été. » D’après Fat Lever, qui a joué onze saisons en NBA et travaillait à Sacramento en tant que responsable du développement des joueurs lorsque l’équipe a recruté Robinson, la NBA se résume à une seule question : es-tu prêt à jouer ? Robinson n’était pas prêt, et il n’y avait aucun vétéran dans l’équipe pour le guider. « Quand vous arrivez en NBA, les entraîneurs attendent de vous que vous soyez tout de suite performant, surtout si vous êtes une jeune équipe qui tente de construire quelque chose, explique Lever. Vous êtes un choix de premier tour, les attentes sont élevées et à Sacramento, où la ville n’a pas d’autre franchise que celle en NBA, vous êtes constamment sous le feu des projecteurs. Il y a une pression supplémentaire. »

Robinson accepte les critiques qui lui ont été adressées à ses débuts. « J’étais mal préparé », admet-il. Il est difficile pour un joueur de passer à la NBA après avoir été un maillon essentiel de son équipe universitaire. Cet ajustement fut particulièrement épineux pour Robinson, car il avait été drafté très haut, et pour la première fois de sa carrière, il se retrouvait dans une situation où ses efforts et ses aptitudes physiques ne suffisaient plus. Avant, Robinson pouvait surpasser tout le monde en travaillant dur ; à présent, la courbe d’apprentissage était devenue trop abrupte et le calendrier chargé de la NBA ne laissait guère place à l’amélioration. La situation difficile de la franchise lors de la première année de Robinson ne l’a pas aidé. Pendant la saison 2012-13, des rumeurs circulaient selon lesquelles l’équipe de Sacramento pourrait être transférée à Anaheim, Virginia Beach ou Seattle. Les frères Maloof, propriétaires de l’équipe, déclaraient ne plus avoir les moyens d’assumer les dépenses liées à la gestion d’une franchise NBA destinée à de petits marchés. Dans le vestiaire des Kings, l’atmosphère était sombre et les joueurs se disputaient souvent avec Smart. « Si Keith Smart m’avait eu dans une situation différente, où il aurait été plus à l’aise en tant qu’entraîneur, les choses auraient bien mieux fonctionné avec moi et avec les autres, déclare Robinson. [Il] devait en quelque sorte sauver son poste et n’avait pas le temps d’accorder l’attention dont un rookie comme moi avait besoin. Il ne pouvait pas se permettre de me laisser jouer car mes erreurs pouvaient nous coûter des matchs. Tout ce que les rookies doivent faire pour progresser, je ne l’ai pas fait. »

Lorsque les Kings ont refait signer Jason Thompson avant la première saison de Robinson, ce dernier a dû s’écarter pour lui laisser la place. Il n’a joué que 51 matchs à Sacramento et n’a dépassé qu’une seule fois les 30 minutes de jeu, à son sixième match en NBA. Avec les Kings, il n’a jamais marqué plus de 12 points. « Il ressemblait un peu à un poisson hors de l’eau », confie Napear. Aussi, lorsque la date limite des transferts s’est approchée et que les Kings ont cherché à réduire leur masse salariale, ils ont envoyé Robinson, Francisco Garcia et Tyler Honeycutt aux Rockets contre Aldrich, Patrick Patterson et Toney Douglas. « [Robinson] était un incroyable rebondeur et un athlète fantastique, mais il avait plus de lacunes que d’atouts, déclare Napear. Patrick Patterson était cinq fois meilleur que [lui]. L’occasion était trop belle. »

Robinson a appris son transfert par un SMS de Marcus Morris, qui avait été lui-même transféré de Houston à Phoenix dans le cadre d’un autre échange. « Je venais de quitter l’entraînement, se souvient Robinson. Ce qui est dingue, c’est que le manager été aimable et souriant avec moi, alors qu’il avait décidé depuis longtemps qu’il allait m’échanger. Mais c’est le métier qui veut ça. C’est le genre de chose qui vous donne envie de vomir. » Le passage de Robinson à Houston a été encore plus court : 19 matchs à peine. Il a été transféré à Portland durant l’été, avant d’avoir pu trouver sa place parmi les Rockets. À la fin de la saison, Houston avait besoin de libérer le plus d’argent possible pour avoir une chance d’obtenir Dwight Howard, et le contrat de Robinson devint précaire. « Je savais que Houston allait participer aux play-offs. Je pensais donc avoir une chance, une occasion de me mettre en avant, raconte Robinson. [Après le transfert,] j’étais tellement bouleversé que je n’ai quasiment rien fait le reste de l’année. »

Avec les Blazers, au moins, Robinson a réussi à accomplir une saison pleine en 2013-14. « Il a amené beaucoup d’énergie. Il anticipait bien les rebonds, déclare l’entraîneur de Portland, Terry Stotts. C’était un défenseur polyvalent car il pouvait aussi défendre au périmètre. Ses qualités athlétiques et sa robustesse étaient des atouts. » La foule bruyante de Portland rappelait à Robinson les supporters passionnés de la salle Allen Fieldhouse, au Kansas, et il s’en est nourri. Lors d’un match contre les Timberwolves, Robinson a réalisé l’une des plus belles actions de la saison de Portland : il a bloqué un tir de Corey Brewer et déclenché une contre-attaque qui a abouti à un dunk de Will Barton. « L’ambiance était à fond et c’est pour ça que je vis, se souvient Robinson, qui avait bloqué si fort le tir d’un adversaire au lycée qu’il s’était cassé la main. C’est comme ça que je suis. Ce genre d’action me fait me sentir vivant. J’adore ça. »

Mais si Robinson s’était installé dans la rotation des Trail Blazers, il était barré par LaMarcus Aldridge et ne disposait pas beaucoup de temps de jeu. En février, Portland a voulu renforcer l’effectif en vue des play-offs et a cédé Robinson à Denver dans un échange visant à acquérir Arron Afflalo. Les Nuggets n’ont pas voulu garder Robinson et, malgré les rumeurs selon lesquelles Brooklyn était intéressé, Philadelphie l’a réclamé avant que les Nets ne puissent le signer à nouveau. Après trois saisons instables, Robinson a qualifié de moment « probablement le plus heureux » de sa carrière le parcours en play-offs de Portland en 2014. « Je me suis tué au travail l’été [précédent] parce que je savais que si je faisais partie de la rotation en play-offs, je jouerais 15 à 20 minutes [en saison régulière]. C’était ce qu’on m’avait répété tout l’été. J’étais sûr que les choses allaient tourner en ma faveur. J’étais enthousiasmé. J’ai travaillé comme un dingue. Puis je suis revenu, et voilà. La douche froide. »

La NBA est un rêve. Et une entreprise.

Pour les joueurs de la ligue, une carrière durable signifie trouver un juste milieu entre ces deux déclarations. « En tant que basketteurs, nous sommes très compétitifs et nous voulons bien faire, dit Jackson. Mais les jeunes joueurs, surtout, ne comprennent pas les règles du jeu. Ils ne comprennent pas le jeu offensif, les circonstances. Quand on est jeune, on joue simplement avec le talent donné par Dieu. Il n’y a qu’un très petit nombre de rookies [qui] qui comprennent vraiment le jeu car [cela] leur est facile. Certains vont être des superstars. Certains vont être des role players. Certains ne vont pas quitter le banc. Si vous voulez faire une longue carrière, vous devez être capable de l’accepter. »

Jason Smith a entraîné Robinson à la Brewster Academy, une école préparatoire d’élite du New Hampshire, dans laquelle Robinson a été transféré au lycée. Au début de sa carrière en NBA, Smith remarqua que Robinson essayait trop souvent de prouver qu’il avait mérité sa sélection dans les cinq premiers choix de draft. « Souvent, les jeunes ne se rendent pas compte qu’ils exercent un métier, dit Smith. S’ils ne sont pas performants, on trouvera quelqu’un pour les remplacer. Souvent, on dit aux jeunes joueurs à quel point ils sont formidables et ils ne se concentrent plus sur le fait qu’il faut [s’améliorer] chaque jour. Je pense que l’erreur commise par Thomas lorsqu’il est entré en NBA est qu’il a pensé qu’il devait renforcer son jeu, au lieu de se concentrer sur ce qu’il faisait mieux que la plupart des autres. »

Redd, l’entraîneur de l’AUA, a donné à Robinson un conseil similaire, en lui recommandant de ne pas tirer « à moins qu’il ait de la peinture sous les pieds ». Robinson est si proche des jumeaux Morris que Redd pense qu’il a essayé d’élargir son jeu pour refléter leur façon de jouer, alors qu’il aurait du insister sur ses qualités au rebond et sa ténacité. « De deux chose l’une : soit vous faites ce que vous voulez et la ligue vous pousse dehors, soit vous faites ce qu’ils veulent et on vous paye, se souvient Redd. C’est aussi simple que ça. Vous exercez un métier et en tant qu’employé, vous devez faire ce que votre employeur veut. Pas ce que vous voulez faire et ce que vous pensez pouvoir faire. » Redd dit que Robinson était d’accord sur le moment, mais qu’il a fini par recommencer à prendre des tirs à mi-distance. « Aussi bon que soit Thomas, il ne sera jamais le meilleur joueur d’une équipe NBA, déclare Self. Avant, toutes les actions étaient pour lui ; maintenant, la seule façon pour lui de marquer dépend du jeu de quelqu’un d’autre. Je comprends que cela puisse devenir frustrant. »

Pendant des années, Robinson a vu les autres joueurs avoir des occasions de se mettre en avant, et il s’est souvent demandé quand son tour arriverait. « Cela me fait mal au ventre à chaque fois. Je ne peux pas regarder certains joueurs dans les yeux à cause de ça. Puis je suis en colère contre moi-même parce que je ne suis pas du genre à m’en prendre à qui que ce soit. » Il veut montrer ce qu’il croit – qu’il est suffisamment polyvalent et talentueux pour jouer sous le panier et vers le périmètre. C’est cette conviction qui l’a amené à ce niveau – même lorsque ses amis et les critiques lui demandent de rester dans la peinture. « Je peux faire beaucoup plus. Quand j’essaie de le montrer ou de m’exprimer, cela me donne un coup de pied dans le fondement. […] Je connais mes limites. Ce n’est pas simplement [être] un gros rebondeur. Pour l’instant, c’est ce que je fais de mieux. » Pour Robinson, le tout est de trouver la bonne occasion. « Il va y avoir une période d’ajustement, déclare Stotts, rappelant que même certains membres du Hall of Fame n’étaient pas entrés dans la NBA en tant que superstars techniquement achevées. Lorsqu’il est entré dans la ligue, Karl Malone était horrible au lancer-franc. Ce n’était pas un scoreur. C’était un gros rebondeur, très robuste. Puis il est devenu le deuxième meilleur marqueur de tous les temps. »

Au cours des derniers mois de la saison, Philadelphie a offert à Robinson l’occasion qu’il avait tant convoitée. Robinson a eu la chance de montrer sa valeur et de faire taire ses détracteurs. Durant sa courte période avec l’équipe, Robinson a enregistré 18,8 points et 7,7 rebonds en 18,5 minutes par match. L’entraîneur de Philadelphie, Brett Brown, lui a permis de jouer malgré ses erreurs. « Il a joué pour de bonnes équipes pour lesquelles il n’a pas pu s’exprimer à travers les rotations, déclare Brown. Cela arrive à beaucoup de jeunes. Ce n’est pas une critique. Ici, nous sommes dans un mode de reconstruction et en raison de ses qualités, il m’a été facile de lui trouver des minutes. » Jouer à Philadelphie a également renforcé les relations de Robinson avec sa sœur, Jayla, qui a pu regarder plusieurs de ses matchs. « Si ma sœur n’a pas les meilleures opportunités, j’ai l’impression que c’est de ma faute, a déclaré Robinson. En ce moment, j’ai tout ce qu’il faut pour lui donner une belle vie. Si j’ai des ennuis, si je ne garde pas mon travail en NBA, les choses deviendront plus difficiles pour elle. »

D’après Redd, c’est à cause de cette pression que Robinson n’a sans doute pas eu le temps de digérer le décès de sa mère. Le basket et Jayla ont pris tout son temps. « Je pense encore aujourd’hui qu’il n’a pas eu le temps de faire entièrement son deuil, déclare Redd. Il y a le basket-ball, sa sœur, le fait qu’il ait été échangé, le fait de ne pas jouer. Je pense qu’il a trop de choses en tête. Il ne sait jamais s’il intégrera une équipe de manière durable ou s’il jouera. Il doit être épuisé mentalement. »

Pour les fans, un échange ne peut représenter qu’un événement banal défilant au bas de l’écran pendant l’émission SportsCenter. Mais lorsqu’un joueur est échangé, sa vie est déracinée. Dans sa jeune carrière, Robinson a déjà été échangé, remercié et réclamé en tant qu’agent libre. Une chose lui facilite néanmoins les choses : peu importe où il atterrit, les Morris lui trouveront un endroit pour vivre. À Houston, Robinson a pris la place de Marcus parce qu’ils participaient tous deux aux transactions de date limite de février. À Philadelphie, ils ont une maison où Robinson avait déjà des vêtements entreposés. Angel Morris a vécu là-bas avec lui. Avec son travail à elle et son voyage, ils se sont rarement vus la saison dernière, mais il était toujours réconfortant d’être proche d’un être cher. Si Robinson signe de nouveau à Philadelphie, Angel l’aidera à trouver sa place en ville.

Sur la route qui mène à la NBA, le passage du rêve à la réalité est un défi. « À l’université, quand l’entraînement est fini, vous rentrez dans votre chambre avec vos coéquipiers, confie Marcus Morris. La NBA est une entreprise. Les rapports avec vos équipiers ne sont pas les mêmes. Vous ne passez pas autant de temps avec eux. La cohésion n’est pas forcément toujours là. À l’université, il est presque nécessaire d’avoir de la cohésion. Vous êtes payé pour jouer en NBA, poursuit Morris. Nous avons tous des problèmes et cela fait partie de la vie, mais quand vous êtes en NBA, vous devez vous occuper de ce que vous faites sur le terrain avant tout. »

Voilà pourquoi cet été pourrait être déterminant pour la suite de la carrière de Robinson. Son contrat de rookie a expiré. Son avenir en NBA dépend de sa capacité à signer de nouveau avec les Sixers ou une autre équipe, et à trouver enfin de la cohérence et du succès dans son nouveau rôle. Mais Robinson espère toujours devenir All-Star. « Si cela se passe mal, ce sera de ma faute, assume-t-il. Je prendrai tout sur moi-même. »

#91 : Kevin Durant (provisoire)

Pour comprendre la façon dont les joueurs ont été classés, merci de consulter cet article.

Le portrait de chaque joueur se divise en trois parties : le C.V. (qui résume le palmarès et les accomplissements du joueur), le côté pile (ses qualités) et le côté face (ses défauts).

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KEVIN DURANT

CV arrêté à la saison 2016-2017

10 ans de carrière, dont 9 de qualité.
8 fois All-Star.
MVP 2014.
MVP des Finales 2017.
MVP du All-Star Game en 2012.
Rookie de l’année en 2008.
Parmi les 5 meilleurs joueurs de la NBA de 2010 à 2017.
Pic de forme de 5 ans en saison régulière : 29 points, 7,5 rebonds et 4 passes décisives de moyenne.
Pic de forme de 5 ans en play-offs : 29 points, 8 rebonds et 4 passes décisives de moyenne (83 matchs).
Champion NBA avec les Warriors en 2017, vice-champion NBA avec le Thunder en 2012.

*****

Kevin Durant est probablement le meilleur joueur de sa génération. Considéré dès le lycée comme une superstar, il confirme ce statut à l’université et rejoint la NBA en 2007. Lors de sa première saison avec les Sonics (qui deviendront le Thunder d’Oklahoma un an plus tard), Durant compile plus de 20 points par match et gagne le trophée de « Rookie of the Year ». Il enchaîne les performances époustouflantes avec régularité, entre dans le premier cinq majeur de la NBA lors de sa troisième saison, gagne quatre titres de meilleur scoreur et reçoit le trophée de MVP en 2014. Sa taille et ses longs bras font de lui un défenseur redoutable, et le rendent presque impossible à arrêter en attaque. Durant sait marquer, prendre des rebonds, faire des passes, défendre, porter son équipe lorsqu’elle en a besoin. C’est le franchise player par excellence.

Il y a un défaut, cependant. Bien qu’il évolue dans une très bonne équipe (Russell Westbrook en co-leader, Steven Adams et Serge Ibaka dans la peinture, James Harden en sixième homme avant son départ pour Houston, un banc fourni avec Kanter, Roberson, Waiters…), Durant ne parvient pas à remporter de titre avec le Thunder. En huit ans, il ne parvient qu’une seule fois une finale, en 2012 (défaite face au Miami Heat). Mais l’équipe s’améliore d’année en année, jusqu’à être tout proche de battre les patrons de la ligue, les Golden State Warriors, en 2016 (défaite 4-3 en finale de Conférence après avoir mené 3-1). On se dit que l’heure de Durant ne peut qu’arriver. Et là, surprise : plutôt que de poursuivre le combat, Durant décide de quitter le Thunder pour rejoindre… les Warriors.

La décision de Durant lui vaut les foudres des médias, des supporters, ainsi que des joueurs, anciens et actuels. La principale critique qui lui est adressée est de rechercher la facilité. Durant veut des titres, quel qu’en soit le prix à payer. Ce qui ressemble fortement à un aveu d’échec et d’impuissance. Historiquement, les grand joueurs cultivaient l’esprit de compétition, ce qui rendait leur triomphe encore plus glorieux. Jamais une superstar n’aurait eu l’idée d’en rejoindre une autre pour gagner plus facilement. Jamais. Alors, que dire de tout cela ? Le transfert de Durant ne le fera-t-il pas baisser dans ce classement lorsqu’il raccrochera ?

D’une certaine manière, Durant n’a pas tort : seuls les titres comptent. Il a réussi à se fondre dans le collectif des Warriors de manière admirable, en acceptant de sacrifier des points et de varier son jeu, ce qui n’est pas donné à tout le monde. C’est une performance en soi qui démontre de l’altruisme. Mais en tant que co-patron d’une franchise qui avait tout pour réussir, sa décision va forcément affecter la façon dont on se souviendra de lui. Même si Durant gagne cinq titres avec les Warriors dans les saisons à venir, quelle gloire pourra-t-il en tirer ? Tous les titres obtenus avec les Warriors vaudront-elles ne serait-ce qu’un seul titre avec Oklahoma ? À voir au moment de lui attribuer une place définitive dans le classement.

#92 : Stephen Curry (provisoire)

Pour comprendre la façon dont les joueurs ont été classés, merci de consulter cet article.

Le portrait de chaque joueur se divise en trois parties : le C.V. (qui résume le palmarès et les accomplissements du joueur), le côté pile (ses qualités) et le côté face (ses défauts).

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STEPHEN CURRY

CV arrêté à la saison 2016-2017

8 ans de carrière, dont 5 de qualité.
4 fois All-Star.
MVP 2015 et 2016.
2 titres de champion NBA avec les Warriors (2015 et 2017), vice-champion en 2016.
Parmi les 5 meilleurs joueurs de la NBA de 2014 à 2017.
Meilleur marqueur et meilleur intercepteur de la NBA en 2016.
Cinq fois meilleur tireur à trois points de la saison régulière, trois fois meilleur marqueur de lancers-francs de la saison.
Pic de forme de 4 ans en saison régulière : 26 points, 5 rebonds et 7 passes décisives de moyenne.
Pic de forme de 3 ans en play-offs : 27 points, 6 rebonds et 6 passes décisives de moyenne (56 matchs).

*****

S’il fallait ne retenir qu’une chose de Stephen Curry à ce stade de sa carrière, ce serait sans aucun doute de son extraordinaire saison 2015-2016. Déjà excellent, le niveau de celui qui avait déjà été MVP l’année précédente a été tout simplement exceptionnel : 30 points, 5 rebonds, 7 passes décisives et 2 interceptions de moyenne, 402 paniers à trois points à 45 % de réussite (le record précédent, établi par lui-même, était de… 286 à peine), 50 % de réussite globale aux tirs, 45 % derrière la ligne à trois points et 90 % aux lancers-francs (seul joueur de l’histoire avec Steve Nash à réussir une telle performance), et leader d’une équipe qui finira la saison régulière avec 73 victoires pour seulement 9 défaites, battant le record des Bulls en 1995-1996 de 72 victoires et 10 défaites.

À l’issue de cette saison, Curry sera élu MVP à l’unanimité pour la première fois de l’histoire de la NBA. Difficile de faire autrement, pour un joueur qui a été une menace constante pour ses adversaires par ses gestes de classe et sa précision au tir. Malheureusement, la saison extraordinaire de Curry ne s’est pas bien terminée : à trop chasser les records, les Warriors se sont brûlés les ailes et la fatigue (ainsi qu’une excellente équipe de Cleveland menée par LeBron James) leur a fait perdre la finale 4-3 alors qu’il menaient 3-1, une première dans l’histoire de la NBA. Aujourd’hui, Curry joue avec plus d’économie, et, s’il est en-dessous de ce qu’il a montré en 2015-2016 (tout en restant exceptionnel), bien lui en prend, car il a maintenant deux titres en plus.

Où placer Curry dans ce classement en fin de carrière ? Il est probablement le meilleur shooter de l’histoire du basket moderne. Même s’il est dans une ère taillée exactement pour lui (où le tir à trois points est roi et les défenses moins serrées), c’est une star capable de porter son équipe et d’être présents dans les moments importants, même si la domination des Warriors ne lui a pas permis de prouver qu’il pouvait être décisif en play-offs (la saison 2015-2016 avec des joueurs cramés en finale est une exception). Qui sait jusqu’où il peut aller. Il ne reste qu’à espérer pour lui que son corps le laisse tranquille – les blessures l’ont déjà beaucoup ralenti – et qu’il ait une longévité à la John Stockton.

#93 : James Harden (provisoire)

Pour comprendre la façon dont les joueurs ont été classés, merci de consulter cet article.

Le portrait de chaque joueur se divise en trois parties : le C.V. (qui résume le palmarès et les accomplissements du joueur), le côté pile (ses qualités) et le côté face (ses défauts).

harden

JAMES HARDEN

CV arrêté à la saison 2016-2017

8 ans de carrière, dont 5 de qualité.
5 fois All-Star.
Parmi les 5 meilleurs joueurs de la NBA de 2014 à 2017, top 10 en 2013.
Sixième homme de l’année en 2012.
Pic de forme de 3 ans en saison régulière : 29 points, 7 rebonds et 9 passes décisives de moyenne.
Pic de forme de 3 ans en play-offs : 25 points, 5 rebonds et 7 passes décisives de moyenne (33 matchs).

*****

Lors de son arrivée en NBA, rien ne laissait penser que James Harden allait devenir l’un des meilleurs joueurs de la ligue. Jeune, il ne présente aucune prédisposition ou qualité physique. Plutôt introverti, élevé par une mère célibataire dans un quartier difficile, il apprend le basket seul et s’améliore petit à petit. Au lycée, son entraîneur lui apprend à développer ses qualités et travailler ses points faibles ; il le façonne de façon à faire de lui un joueur « moderne », privilégiant la technique au physique. Doubles-pas, tirs à trois points, lancers-francs, Harden répète inlassablement ses fondamentaux jusqu’à les maîtriser parfaitement. Drafté en 2009 par le Thunder, il remplit d’abord le rôle de sixième homme, puis devient titulaire. Il se révèle si bon qu’il ressent le besoin de s’éloigner des deux autres stars du Thunder, Durant et Westbrook, et rejoint les Rockets en 2012.

Chez les Rockets, Harden explose et s’établit définitivement comme l’un des visages de la NBA. Et quel visage ! Plutôt que de s’intéresser à l’ornement pileux qui le rend reconnaissable entre tous, voyons pourquoi il mérite de figurer dans ce top 100. D’abord, ses qualités de scoreur sont uniques. Il est quasiment inarrêtable en pénétration et quand il n’arrive pas à conclure, il provoque la faute presque à tout coup. Avec ses dribbles croisés et ses feintes de gaucher, il déstabilise les défenseurs comme peu de joueurs avant lui. Il enfile comme des perles les lancers-francs et les tirs à trois points. Et tout cela nuit après nuit, avec une incroyable régularité.

Mais Harden a aussi ses défauts. Le plus gros d’entre eux est sa défense : d’abord correct dans domaine, il a presque totalement cessé de faire des efforts pour se concentrer sur l’attaque, au point d’être souvent la risée de la ligue. Il perd beaucoup de ballons et tire beaucoup trop, de manière parfois très discutable. Et puis, il ne parvient pas à faire gagner son équipe. Du moins, pas encore, même s’il a montré qu’il avait l’étoffe pour le faire.

Cela suffira-t-il à faire de James Harden un top 30 dans ce classement ? Difficile à dire. Harden profite quand même amplement de la direction prise par la ligue aujourd’hui, qui favorise l’attaque au détriment de la défense. S’il avait joué dans les années 90, les choses auraient été très différentes. Et ça, ça compte quand même pour quelque chose, malgré toutes ses qualités. Attendons de voir comment les choses vont évoluer pour lui assurer une bonne place dans ce classement.

#94 : Russell Westbrook (provisoire)

Pour comprendre la façon dont les joueurs ont été classés, merci de consulter cet article.

Le portrait de chaque joueur se divise en trois parties : le C.V. (qui résume le palmarès et les accomplissements du joueur), le côté pile (ses qualités) et le côté face (ses défauts).

WESTBROOK

RUSSELL WESTBROOK

CV arrêté à la saison 2016-2017

9 ans de carrière, dont 7 de qualité.
6 fois All-Star.
Parmi les 5 meilleurs joueurs de la NBA de 2015 à 2017, top 10 de 2011 à 2014.
MVP 2017.
Pic de forme de 3 ans en saison régulière : 28 points, 9 rebonds et 10 passes décisives de moyenne.
Pic de forme de 2 ans en play-offs : 24 points, 5 rebonds et 6 passes décisives de moyenne (37 matchs).
Vice-champion NBA avec le Thunder en 2012.
Une saison en triple-double de moyenne (2017).

*****

Il y a peu de temps encore, le fait qu’un joueur puisse conclure une saison avec un triple-double de moyenne et égaler la performance d’Oscar Robertson dans les années 60 était inimaginable. Eh bien, c’est arrivé. En 2017, Russell Westbrook a aligné 42 triples-doubles en 82 matches et a achevé la saison avec une moyenne de 31,6 points, 10,7 rebonds et 10,4 passes décisives. Il a terminé meilleur marqueur du championnat et a fait un match à 22 passes décisives. Et il n’a pas l’air de vouloir s’arrêter en si bon chemin. Les saisons qui suivent se présentent sous les mêmes aspects que ceux de cette extraordinaire saison 2016-2017.

Arrivé dans la grande ligue en 2008, Westbrook n’a cessé de progresser depuis. Deux premières saisons plus que correctes, puis des performances dignes d’un All-Star. Très athlétique, pratiquement inarrêtable en pénétration, extraordinaire finisseur, les performances en attaque de Westbrook n’ont aucun équivalent chez les meneurs. Ses statistiques donnent le tournis. Il est l’un des meilleurs joueurs de sa génération, et son talent est reconnu par l’ensemble de ses pairs et des journalistes.

Et pourtant…

Aussi impressionnantes soient-elles sur le plan statistique, les performances de Westbrook ne sont parviennent pas à le faire s’imposer aux yeux des spécialistes (et surtout des spectateurs) comme un joueur de premier plan, du calibre de LeBron James ou même James Harden. Peut-être parce que la NBA a considérablement changé ces trois dernières années et donne la part belle aux attaquants, rendant les triple-doubles de moins en moins rares. Peut-être parce que Westbrook, à trop vouloir soigner ses statistiques, nuit finalement à son équipe. Peut-être parce que ses pourcentages de réussite au tir deviennent de plus en plus catastrophiques à force de vouloir marquer encore et encore. Peut-être parce que lors de son extraordinaire saison en triple-double, son équipe n’a terminé que cinquième à l’Ouest et s’est fait éjecter au premier tour des play-offs après cinq petits matchs…

Comment jugera-t-on Westbrook à la fin de sa carrière ? À l’heure actuelle, rien ne laisse penser qu’il gagnera un titre NBA. Ce serait même plutôt le contraire. Peut-on vraiment placer dans les meilleurs meneurs de l’histoire un joueur qui n’a pas été capable de tirer son équipe vers le haut, aussi incroyables ses performances soient-elles ? On ne peut même pas invoquer le fait qu’il a eu de mauvais coéquipiers car il a côtoyé Kevin Durant pendant huit ans, a été entouré par des joueurs solides (Adams, Ibaka), et joue aujourd’hui avec Paul George qui semble l’avoir remplacé en tant que pilier de l’équipe. Un grand joueur, Westbrook ? Indubitablement. Un gagnant ? Non. En tout cas, pas encore.

#95 : Derrick Rose (provisoire)

Pour comprendre la façon dont les joueurs ont été classés, merci de consulter cet article.

Le portrait de chaque joueur se divise en trois parties : le C.V. (qui résume le palmarès et les accomplissements du joueur), le côté pile (ses qualités) et le côté face (ses défauts).

Derrick_Rose

DERRICK ROSE

CV arrêté à la saison 2016-2017

8 ans de carrière, dont 3 de qualité.
3 fois All-Star.
Parmi les 5 meilleurs joueurs de la NBA en 2011 et 2012, top 10 en 2010.
Rookie de l’année en 2009.
MVP 2011.
Pic de forme de 2 ans en saison régulière : 23 points, 4 rebonds et 7 passes décisives de moyenne.
Pic de forme de 2 ans en play-offs : 27 points, 4 rebonds et 7 passes décisives de moyenne (21 matchs).

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Quelle tristesse quand on pense à ce qu’aurait pu être la carrière de Derrick Rose… Aucun jeune joueur n’a atteint les sommets aussi vite. Aucun rookie n’a jamais pénétré dans la raquette et claqué des dunks aussi monstrueux. Aucun joueur n’avait réussi à faire autant décoller la franchise de Chicago depuis la retraite de Michael Jordan. Avec Rose, les Bulls sont sortis des profondeurs du classement, ont atteint les play-offs l’année de son arrivée, et perdu de justesse contre les futurs champions (défaite 3-4 contre les Celtics). Deux ans plus tard, Rose devenait le plus jeune MVP de tous les temps après une saison sensationnelle. À 22 ans seulement, il était au pinacle de la NBA, et tout le monde se demandait où il allait s’arrêter.

La chute a été dure. Très dure. Le jeu ultra-physique de Rose était trop exigeant pour son corps. Après une série de petites blessures, son genou cède en 2012 lors d’une rencontre de play-offs. Un événement tragique et d’autant plus rageant que le match était plié. Rose n’en récupérera jamais. Il retarde son retour et ne joue que dix matches lors de la saison 2013-2014, avant de se blesser à nouveau. S’ensuivent deux ans de galère. Le niveau de jeu de Rose est toujours correct, mais il est à des années-lumière de celui qu’il était. Il passe chez les Knicks, puis chez les Cavaliers, où il est payé au salaire minimum. Après seize matches, il est envoyé au Jazz et immédiatement coupé. Dégoûté, Rose songe à prendre sa retraite, à 29 ans seulement. Mais Tom Thibodeau lui donne sa chance aux Minnesota Timberwolves. Depuis, Rose a semblé retrouver le plaisir de jouer au basket. Il ne sera plus jamais le joueur qu’il a été. Mais il paraît épanoui. Enfin.

À l’heure actuelle, il est difficile de savoir quel sera l’héritage de Rose à la fin de sa carrière. Il aurait pu faire partie des vingt meilleurs joueurs de l’histoire. Ce ne sera pas le cas, on peut l’affirmer avec certitude. Mais pendant trois ans, Rose a survolé la ligue comme personne avant lui. Et ces trois années à elles seules méritent une place dans ce top 100. Même si elle se trouve parmi les dernières.