All the Kings’ Men (7/8)

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Du « Hack-a-Shaq », des arbitres lunatiques, un empoisonnement alimentaire, et le dernier « three-peat » à ce jour : une histoire orale des Finales de la Conférence Ouest 2002 entre les Los Angeles Lakers et les Sacramento Kings, le dernier chapitre de l’une des plus grandes rivalités de l’histoire du basket-ball

par Jonathan Abrams, le 7 Mai 2014

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I. Avant la bataille (1/8)
II. La trilogie en marche (2/8)
III. L’affaire du bœuf de Kobe (3/8)
IV. « Big Shot Rob » sauve son équipe (4/8)
V. Avantage psychologique ? (5/8)
VI. Quand le vent siffle dans l’autre sens (6/8)

VII. Le quinzième round

Naturellement, nous en sommes arrivés à l’un des Matchs 7 les plus mémorables de tous les temps. Ce n’était que le deuxième Match 7 d’une Finale de Conférence à aller en prolongation depuis 1993. Le match, très serré, a vu 16 égalités, 19 changements de leader et, très probablement, plusieurs tympans percés à cause du bruit assourdissant de la foule de l’Arco Arena. Les Lakers tentaient de devenir la première équipe à remporter le septième match d’une finale de Conférence à l’extérieur, depuis que Philadelphie avait surpris les Celtics au Boston Garden en 1982.

Howard-Cooper : Ils sont revenus à Sacramento, et c’est là qu’ils ont vraiment ressenti le contrecoup. C’était pire que de perdre le premier match à domicile, pire encore que quand Horry leur a collé ce panier à la dernière seconde. Ils avaient perdu le Match 6, étaient rentrés à la maison, et ils avaient cette sensation dont les gens parleraient plus tard, cette sensation d’avoir laissé passer leur chance.

Voisin : Avant le match, je suis allé dans les vestiaires. Ce qui m’a marqué, c’est que les joueurs se plaignaient toujours du Match 6 et de la façon dont ils s’étaient fait voler. Tout le monde, de Rick Adelman à Geoff Petrie. Ils n’avaient toujours pas digéré le Match 6.

George : Quarante minutes avant le début du match, tous les sièges de la salle étaient remplis. Les supporters portaient des T-shirts blancs, agiraient des serviettes blanches, applaudissaient très fort. Et ce n’était que l’échauffement. Le match n’avait même pas encore commencé. Je me souviens que le titre de James Brown « The Payback » passait en boucle, comme si leur temps était venu.

Napear : C’était une chance pour la communauté, la ville, l’équipe de faire quelque chose que personne ne pensait jamais voir : aller en finale NBA.

Brown : Ce dont je me souviens, c’est que nous avions travaillé les lancers francs toute l’année. Nous n’avons pas tenté beaucoup de lancers francs avant le septième match.

Pollard : Les gens me demandent si le basket me manque. Je suis à la retraite depuis cinq ans. Quand je leur dis que non, ils me demandent pourquoi. Je regrette mon salaire, mais pas ce que je devais faire pour l’obtenir. La seule chose qui me manque, c’est cette poussée d’adrénaline. Entrer sur le terrain et faire hurler 20 000 personnes. Les stars du rock font de la scène jusqu’à 70 ans pour ressentir ça. Les joueurs prolongent leur carrière juste à cause de ça.

Fox : Nous étions l’équipe la plus expérimentée. J’ai essayé de me concentrer là-dessus. J’ai essayé de me concentrer sur le fait que nous avions joué un Match 7 à Portland quelques années plus tôt.

Christie : Je n’avais jamais eu affaire à quelque chose comme ça. J’étais ému. Je n’avais pas compris ce que je traversais. Quand vous êtes déjà arrivé à ce stade, vous savez à quoi vous attendre. Donc j’étais sûr qu’à l’autre bout du terrain, ils étaient tranquilles comme Baptiste.

O’Neal : Pendant l’hymne national, j’aime regarder les gens dans les yeux. Je garde la tête baissée pendant la majeure partie du chant jusqu’à « l’éclat rouge des fusées ». C’est là que je lève la tête et que je regarde les gens, et quand je les regarde dans les yeux et qu’ils baissent la tête, je sais qu’ils ont peur.

Fox : Nous savions à quel point un Match 7 pouvait être émotionnellement et physiquement épuisant. Nous savions, au fur et à mesure du match, combien les possessions devenaient intenses et combien la pression pesait. Je savais que nous savions ce que ça faisait. Et je savais que les Kings ne savaient pas à quoi cela ressemblait.

Christie : J’étais ému. C’était un Match 7 contre les Lakers. Dans mon esprit, c’était ça. Si nous les battons, nous allions écraser les New Jersey Nets. Ce fut un moment fort à plusieurs points de vue. Toute votre vie, vous travaillez pour ça.

Brown : Je n’ai pas vraiment vu qui que ce soit être nerveux. Je sais que Webb et les autres voulaient gagner. Je n’ai pas vu Doug avoir peur. Je n’ai pas vu ça. Je ne l’ai pas vu. Je sais que Bobby Jackson a joué un rôle important dans le Match 7.

Rambis : Je me souviens d’avoir dit à Phil : « Ils ont peur de tirer. » Les joueurs étaient libres de tout marquage et ils ne rentraient rien, à l’exception de Bibby.

Heisler : En fin de partie, [Webber] a eu le ballon dans ses mains et c’était comme s’il avait attrapé une grenade. Il l’a secoué dans tous les sens, sans même songer à le passer à Mike Bibby.

Richmond : J’avais une peur bleue de perdre contre les Kings. Je pensais que ces sept années de succès allaient prendre fin et que les Kings iraient en finale. J’avais beaucoup de choses en tête. Quand j’étais sur le banc, je transpirais, alors que je ne jouais même pas.

Christie : Vers la fin du temps réglementaire, je pensais que le toit allait tomber. Ça tremblait de partout. Les supporters faisaient sonner leurs cloches, mais on ne les entendait même pas. Les gens étaient devenus fous. Le sol tremblait et en me dirigeant vers l’un des arbitres, je me suis dit que c’était incroyable.

Howard-Cooper : Comme un grand mur de son, de chaleur et de stress.

Wallace : On était assis sur le banc avec des boules Quiès.

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Dans les dernières secondes, alors que le score était à égalité, Stojakovic a complètement raté un tir à trois points qui aurait pu envoyer les Kings en finale. En prolongation, Christie a nettement raté un tir à trois points crucial. Finalement, ce sont ces deux tirs dont on se souvient le mieux. À part Bibby et Jackson, tous les autres Kings semblaient timides et écrasés par la pression. Sacramento a raté 14 lancers francs sur 30 et 18 tirs à trois points sur 20. Pendant ce temps, Shaquille O’Neal, Derek Fisher et Kobe Bryant ont marqué leurs huit lancers francs en prolongation. Les Lakers ont gagné 112-106.

Voisin : La plupart des joueurs étaient tendus, à l’exception de Bobby Jackson. Mais il était sur le banc, Dieu sait pour quelle raison. Rick avait remis les titulaires. Il a fait rentrer Peja, qui était blessé à la cheville, et Doug Christie.

Pollard : Au quatrième quart-temps, personne ne pouvait rentrer un tir. Cela m’a énervé parce que je faisais un bon match, peut-être l’un des meilleurs matchs de ma carrière en play-offs. Et je n’ai pas mis un pied sur le terrain au quatrième quart-temps. Après ce match, j’étais assez énervé parce que j’avais l’impression de contribuer, de faire quelque chose et de libérer mes coéquipiers.

Christie : Nous étions l’une des meilleures équipes de la ligue au lancer franc. Et puis, Peja a fait ce tir qui n’a même pas touché le panier. Ça ne lui arrive jamais. Pas même exprès.

Napear : Je ne sais pas si Bobby aurait réussi le dernier tir, mais je sais qu’il aurait au moins touché le panier. Bobby savait être décisif. Il ne ressentait jamais la pression, quelle que soit la situation.

Bobby Jackson : On suit les consignes de l’entraîneur. On respecte ses instructions et on fait ce qu’il dit. Au début de ma carrière, j’aurais probablement protesté, mais nous avions une si bonne alchimie, nous comptions en quelque sorte les uns sur les autres et nous avons respecté ce que l’entraîneur voulait en terme de temps de jeu et de prise de décision. Et nous ne l’avons pas remis en question.

Fox : Le seul joueur que je n’avais pas laissé seul durant toute la série s’est retrouvé seul pendant une seconde. J’étais parti en aide sur une pénétration, le ballon est ressorti pour Stojakovic, et s’il avait rentré ce tir qu’il met toujours habituellement, la série aurait été différente.

Divac : Peja était blessé, il avait un problème à la jambe. Mais bon, quand vous savez que votre tir peut vous envoyer en finale, et que celui qui va en finale gagne…

Stojakovic : Parfois, je me fais des reproches. Je pense que beaucoup de joueurs pensent à cette série et à ce que chacun d’entre nous aurait pu faire mieux. Personnellement, je pense encore à ce tir raté. Cela aurait peut-être pu faire la différence. C’est toujours dans ma tête.

Fox : Il a complètement raté son tir. Probablement parce qu’il était surpris d’être aussi seul.

Stojakovic : Maintenant que j’y pense, je me rappelle de ce tir et ça ne me fait pas du bien. Hedo me l’a ressorti dans le coin et je me suis peut-être un peu précipité. Il est bien parti, mais j’ai mal visé. J’ai simplement mal visé.

Turkoglu : Il était blessé à ce moment-là. Il avait pris la décision d’aller sur le terrain et d’essayer de faire de son mieux pour aider l’équipe. S’il n’avait pas été blessé, j’aurais mis tout mon argent sur le fait qu’il allait rentrer ce tir.

Christie : J’ai moi-même raté le panier sur un tir [en prolongation]. Il était bien parti. En y repensant maintenant, quand Bib m’a passé le ballon, je pense que j’avais encore quelques secondes. J’aurais pu me ruer vers le panier. Dans l’ensemble, c’était un match bizarre.

Wilbon : Le [tir] de Doug était en courbe, comme s’il avait lancé un boomerang ou quelque chose comme ça.

Voisin : Doug n’y arrivait pas. Il ne rentrait aucun tir.

Pollard : Je pense que [Doug] était psychologiquement cuit. Il avait eu des difficultés toute la série. Il n’a pas bien tiré, en particulier lors du septième match, mais personne n’a vraiment bien tiré lors du septième match. On a vraiment été mauvais.

Fox : Je savais que certains d’entre eux allaient être tendus, mais je ne savais pas qui. Je savais que les douze joueurs ne seraient pas aussi libérés et fluides qu’ils l’étaient probablement dans les six premiers matchs.

George : Quand nous étions assis sur leur banc, leurs fans pouvaient littéralement nous taper sur l’épaule en tendant la main. Ils étaient juste derrière nous. Et ils faisaient du bruit. Ils faisaient sonner leurs cloches de vaches et je me souviens que lorsque nous étions pratiquement sûrs d’avoir la victoire en poche, tout est devenu très calme. Les cloches se sont arrêtées et je me souviens que l’entraîneur s’est adressé au gars derrière le banc en disant : « Je croyais que tu allais sonner cette cloche toute la journée ? Je ne l’entends plus. » Et le gars s’est remis à faire sonner sa cloche, en nous perçant les tympans.

Adande : Le Match 7 était si intense que j’en ai attrapé mal à la tête. Mes oreilles bourdonnaient. Mon estomac était noué.

Adelman : Si vous voulez écrire qu’ils ont été meilleurs, faites-le. Mais je ne suis pas d’accord.

Christie : Nous les avons regardés droit dans les yeux et nous avons rivalisé avec eux. À mon avis, ils savaient que le vainqueur de cette rencontre allait gagner le titre. Quand ils nous ont battus, c’était plié.

O’Neal : La salle était très, très bruyante. Si nous pouvons surmonter ça, alors nous pouvons surmonter n’importe quel adversaire de la Conférence Est. C’était bien de jouer là. Vous arrivez dans une arène hostile et on s’attend à ce qu’ils gagnent, et vous gagnez en faisant le boulot dans un Match 7. J’aime ça.

Pollard : On peut parfaitement mettre la défaite du Match 6 sur le compte des arbitres. Mais il y avait toujours le Match 7. On a craqué et on a perdu. Nous aurions dû gagner. Même si ça fait mal, j’ai l’impression que je devrais avoir une bague.

Adande : Si votre arrière titulaire est terrifié avant le Match 7 à domicile, vous n’êtes pas prêt et vous ne méritez pas de gagner ce match ou la série. Les Lakers ont remporté un Match 7 à l’extérieur. Vous rendez-vous compte à quel point c’est rare ? Un Match 7 à l’extérieur après prolongation ? Les Kings n’étaient pas tout à fait prêts. Ils ont perdu le premier match à domicile. Ils ont perdu le Match 7 à domicile. Ce sont deux choses qui ne devraient pas arriver.

Gerould : L’expérience des Lakers dans les gros matchs a vraiment payé. Les Kings étaient trop conscients de l’opportunité qui se présentait dans le septième match, et en prolongation. Je pense que la pression a fait des ravages.

Phil Jackson : Vous ne pouviez rien demander de mieux dans le septième match d’une série.

Adelman : Je suis extrêmement déçu pour notre équipe. Ils ont joué avec leur cœur et on dirait qu’on leur a arraché. Nous avons fait tout ce que nous pouvions… Je ne sais pas comment nous avons fait pour perdre cette série.

Webber : Il y a tant de choses dans cette série qui auraient pu tourner en notre faveur. C’est stupide de passer tout son temps à y penser. Ça ne sert à rien.

Pollard: J’ai l’impression que ma carrière se serait peut-être déroulée différemment si nous avions gagné cette année-là. Mais c’est arrivé comme ça.

Divac : En gros, les lancers francs nous ont coûté la partie.

Howard-Cooper : Les Kings ont raté leurs lancers francs. C’est ce qu’il y a à retenir. On ne pouvait pas rattraper ça.

Phil Jackson : Ce sont finalement les lancers francs qui ont fait la différence. Ils étaient trop tendus. Les gens s’interrogent souvent sur les joueurs qui n’arrivent pas à tirer des lancers francs, ces grands gaillards qui arrivent sur la ligne. Ils marquent 80 % d’entre eux à l’entraînement et 50 % en match. Ils se demandent pourquoi ces joueurs, qui sont des professionnels, n’y arrivent pas. C’est à cause de la pression. C’est ce qui arrive dans un match comme celui-là, et nous avions l’expérience d’un septième match, et cette équipe avait été dans une position où elle avait connu des échecs. Ils avaient été balayés deux fois en séries éliminatoires deux ans avant que je vienne les entraîner en 1999 et en 2000. Ils en étaient donc vraiment conscients.

Bobby Jackson : Nous nous sommes battus nous-mêmes. Revoyez le match, regardez toutes les erreurs que nous avons faites, tous les lancers francs que nous avons ratés. Nous étions une très bonne équipe aux lancers francs. Nous nous sommes tirés une balle dans le pied.

Brown : Les gars étaient un peu abattus. Mais c’était une équipe assez jeune, alors on se disait qu’on avait eu un petit avant-goût. Il faut ramper avant de savoir marcher.

Phil Jackson : Je me souviens du moment où Shaq a chambré les supporters adverses alors que nous sortions du parking. Ils nous avaient chambrés en entrant.

Adande : Ce dont je me souviens en particulier est que Kobe est sorti de la salle avec moi après le Match 7, et j’ai posé des questions sur leur rivalité. Il a dit : « Attends. Ils doivent d’abord nous battre pour qu’on puisse en parler. C’est comme ça que ça se passe. »

Devin Blankenship (coordinateur du contenu Web, Kings) : Après avoir perdu le Match 7, on est restés au centre d’entraînement jusque tard dans la nuit. Après la conférence de presse, on retourne dans un petit espace ouvert où on parle avec les médias. Mon patron à l’époque était Troy Hanson, qui était directeur des relations publiques. Dans le reste du département, nous avions toujours entendu des histoires selon lesquelles l’équipe devait d’abord encaisser des défaites difficiles avant de remporter la mise. Donc, dans notre esprit, nous nous disions que ce n’était que le début. Troy nous a surpris en train de parler et il s’est dit : « Et si on avait laissé passer notre unique chance ? »

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VIII. Epilogue : « Il n’y aura pas de revanche » (8/8)

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