Steve Nash avec les Dallas Mavericks avant son départ pour Phoenix (1).
29 avril 2004. Les Dallas Mavericks sont éliminés par les Sacramento Kings au premier tour des play-offs, perdant le cinquième match des séries d’un tout petit point. Du déjà vu pour les Mavs, qui, depuis trois ans, ont la fâcheuse habitude de réaliser d’excellentes saisons régulières avant de chuter au moment le plus important. L’équipe est talentueuse, le trio Nash-Finley-Nowitzki est l’un des meilleurs combos offensifs de la NBA, mais le groupe manque de cohésion. Les vétérans Shawn Bradey et Scott Williams sont les seuls vrais pivots présents dans l’effectif, et n’ont plus le physique pour prétendre à une place de titulaire indiscutable. Par conséquent, Nowitzki est souvent contraint de se décaler en 5, ce qui ne lui convient guère.
Le banc des Mavs ne donne pas non plus entière satisfaction : les recrues Antawn Jamison et Antoine Walker n’ont pas eu l’impact espéré, même si Jamison a obtenu le titre de sixième homme de l’année. Leur apport défensif est limité et Walker a tendance à beaucoup « arroser ». Les deux joueurs ne feront pas long feu à Dallas ; ils seront échangés dès l’été 2004, une période qui coïncide avec un événement en particulier : le départ de Steve Nash.
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À l’époque, Nash n’a pas la réputation dont il jouit aujourd’hui. Doté d’indéniables qualités offensives, il fait peine à voir en défense et deux choses le pénalisent en cette fin de saison 2004. D’abord, il n’a pas été très à son aise lors des deux play-offs précédents, ce qui fait tache pour un joueur supposé être l’un des leaders de son équipe. Ensuite, il a un contrat à 60 000 000 de dollars, ce qui paraît exagérément élevé pour un meneur de trente et un ans avec des problèmes de dos. Lorsque Nash se retrouve agent libre à l’été 2004, les Mavericks ne se pressent donc pas pour le reprendre. Ils préfèrent investir dans un pivot, le principal élément qui leur fait défaut. Nash fait ses adieux à Dallas et signe à Phoenix, le club de ses débuts.
Vu sous cet angle, on peut penser que les Mavs n’ont pas eu vraiment tort en ce qui concerne Nash. Sauf que Dallas a commis deux erreurs monumentales.
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Première erreur : d’abord, les Mavs ont utilisé l’argent avec lequel ils payaient Nash pour faire signer un contrat encore plus important (73 000 000 $) à… Erick Dampier. Dampier est un pivot au physique impressionnant, gros rebondeur, gros défenseur, et à l’inconstance légendaire. En 2004, il a affiché au cours des trois derniers mois de la saison régulière une moyenne de 13 points, 13 rebonds et 2 contres par match, dont deux grosses performances successives au cours de la dernière semaine : un match à 19 points et 21 rebonds, puis un autre à 16 points et 25 rebonds. Dampier s’est même auto-proclamé deuxième meilleur pivot de la NBA derrière Shaquille O’Neal.
Sauf que si on enlève 2004, sa moyenne en carrière est de… 8 points et 7 rebonds.
Dallas s’est laissé emporter et s’est fait avoir en le payant au prix fort. Au cours des play-offs de 2005, Dampier se fera détruire par Yao Ming et deviendra la cible de multiples plaisanteries de la part des médias et de Shaquille O’Neal, qui fera de Dampier l’une de ses principales sources de moquerie.
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Deuxième erreur : même s’ils ne pouvaient pas le deviner à l’époque, Dallas a sous-estimé les changements de règles qui ont été instaurées en 2005, et ont fait de Nash un double MVP. La puissance armada des Detroit Pistons avait remporté le titre 2004, et la défense avait pris le pas sur l’attaque au point que les gestionnaires de la NBA se sont creusés la tête pour rendre le basketball à nouveau attractif. Résultat : l’usage excessif des mains en défense est devenu illicite, les arbitres ont commencé à regarder ailleurs sur les écrans illégaux et le jeu s’est accéléré.
Parmi tous les joueurs ayant directement bénéficié des changements de règles avant la saison 2005, Nash est en tête de liste. Il est devenu le moteur du formidable jeu offensif de Phoenix et a revitalisé la position de meneur au point que les journalistes ont commencé à le citer comme un candidat pour le titre de MVP, une récompense qu’il obtiendra deux fois, en 2005 et 2006 (2).
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S’ils avaient conservé Nash et Antawn Jamison, l’effectif de Dallas pour les années à venir aurait été monstrueux. Même s’ils perdent Finley en 2005 pour des questions de taxe de luxe, ils se retrouvent avec Nash, Nowitzki, Jamison, Jason Terry (échangé contre Antoine Walker), Josh Howard, DeSagana Diop, un vétéran agent libre et un joueur acheté en février. Et les Mavs deviennent l’équipe NBA la plus agréable à regarder évoluer.
En y repensant, il est étrange que le propriétaire des Mavs, Mark Cuban, ait voulu économiser en laissant partir Nash juste avant de faire des dépenses irréfléchies sur un joueur aussi médiocre que Dampier. Grand penseur et homme d’affaires, Cuban est l’un des propriétaires les plus populaires de la NBA, mais il faut quand même reconnaître qu’il a passé la décennie précédente à jeter des brassées d’argent par les fenêtres. Dommage. Il a quand même réussi à obtenir son titre en 2011, lorsque Nowitzki a porté l’équipe pour arriver à la récompense suprême. S’il y a quelqu’un que Cuban peut remercier, c’est vraiment lui.
(1) Source : http://www.nba.com
(2) Deux titres plus que controversés. Mais nous y reviendrons plus tard.